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mardi 12 avril 2016

Solo en Península........

4 Décembre
Traversée de la baie Sloggett
Ce matin, mon sac est chargé sur le cheval de bât et je pars avec Luis dès 7 heures afin de ne pas être bloqué par la marée montante. Une bonne partie du parcours pour rejoindre la baie Sloggett passe en effet par des falaises recouvertes à marée haute et il ne faut pas traîner.
A pied, Geronimo et Ramón n’ont de leur côté, pas d’autres choix que d’attendre l’inversion de marée pour se mettre en route. Après plusieurs jours, nos chemins se séparent donc sur un dernier maté au rancho Ibarra.

En rejoignant la côte
Certains passages de falaises et de tourbières sont délicats pour les chevaux auprès desquels nous devons marcher la plupart du temps. Nous progressons néanmoins à un rythme soutenu d’autant que nous utilisons les neuf années d’expérience de Luis sur ce terrain. Je découvre ainsi quelques « raccourcis » dont j’ignorais totalement l’existence et je souris en repensant aux galères des précédentes expéditions, alors que d’invisibles traces ne se trouvaient parfois qu’à quelques mètres.

Pas d'échappatoire à marée haute...
La baie Sloggett où nous parvenons, marque l’entrée de la Péninsule Mitre et le rio Lopez qui s’y écoule, en est la porte. Une porte capricieuse, dont le lit change constamment et est vraiment dangereux.
Située à la sortie du canal de Beagle et son abri relatif aux dépressions, cette baie offre un changement d’environnement saisissant. On y accède par un plateau de tourbière dont les couleurs hypnotisent celui qui s’y aventure et permettent de ne pas se laisser effrayer par l’autre rive du rio Lopez. Malgré plusieurs voyages, la péninsule Mitre reste toujours aussi intimidante et me toise durant les quelques heures que demande la traversée de la baie.
Sur le plateau, les convois de bovins escortés régulièrement par Luis ont laissé des traces bien visibles sur certains tronçons de tourbière. La mousse piétinée se régénérant très lentement, suivre ces traces rassure et évite de se perdre mais est également synonyme de pataugeoire…. Et les chevaux n’ont pas nos poids. Soudain mon cheval s’effondre dans un long bruit d’aspiration. L’une de ses pattes est profondément enfoncée dans la tourbe et il parvient avec beaucoup de difficulté à se relever, sortir de ce trou et reprendre sa route aidé de quelques paroles douces.
Ne pas trop suivre les traces, ne pas trop sans éloigner : l'équilibre est fragile.

Baie Sloggett
Le rancho de Ramón marque la fin de ce plateau de tourbière mais nous le quittons plus tôt par un couloir de falaise particulièrement raide, surtout avec un cheval en surplomb….
Par cette voie, nous atteignons la plage à proximité du voilier polaire Nashachata (*). L’hiver dernier a fini de drosser l'épave contre la falaise. Même de quelques yards, les énormes houles du grand Sud ne pourront plus le faire voyager. Son périple s'est définitivement achevé mais tout son matériel récupérable lui survit encore dans les deux ranchos de la baie. Chez Ramón comme chez Luis (rancho Julian), rien ne se perd.

rancho Julian
Celui-là est à moi !











Nous atteignons rancho Julian en fin de mâtinée et le premier réflexe est, comme toujours, d’allumer le feu pour mettre l’eau à chauffer. Les chiens, de leurs côtés, s’affairent à retrouver (et défendre) l’os qu’ils rongeaient déjà lors de leur dernier passage.
Quelques matés puis nous préparons une solide ration de pâtes, qu’une petite sieste aidera à digérer.

Solo 
Le début d’après midi est splendide lorsque nous passons à cheval le gué du rio Lopez. Désormais je suis à la fois seul et entré en Péninsule Mitre. Après ces quelques jours d’approche, me voici dans le vif du sujet et pour bien commencer, dans la grande tourbière à la base des monts Lucio Lopez. Ses trous d’eau scintillent. Ils encadrent mes pas comme autant de balises appliquées à me faire enchaîner les détours pour mieux apprécier l’infinie palette colorée.
Si la météo m’y autorise, mon objectif est de tenter la traversée des monts Lucio Lopez. Luis m’a confirmé qu’il y avait un passage et que la vallée au nord de ces montagnes permettait de rejoindre la baie Aguirre. Au-delà de l’exploration, cela m’éviterait aussi de suivre le littoral très exposé et qui m’avait laissé un détestable souvenir lors de ma précédente tentative.

Un derrière regard à la baie Sloggett....
.... avant d'entrer dans le royaume du condor.











Tant que le ciel est bleu, je ne traîne pas et me lance donc dans l’ascension avec l’espoir de trouver un col. Malheureusement seuls des précipices m’attendent sur le versant Nord des premières crêtes et il faut se résoudre à faire demi-tour avant que le soleil ne se couche.
J’enrage à l’idée de ne peut être plus pouvoir accéder aux cîmes le lendemain et devoir à nouveau longer le littoral. Je parie néanmoins sur une nuit calme et bivouaque donc dans une vallée d’altitude, afin de rejoindre les cîmes au plus tôt le lendemain.

Le passage du soleil derrière la montagne amène une ombre fraîche qui semble réveiller le vent, bien discret tout l’après midi. Malgré cette brutale chute des températures, le ciel reste du bleu le plus optimiste et de mon perchoir, je profite d’une magnifique soirée à l’embouchure du canal de Beagle.
J’ai confiance pour le lendemain. Je vais trouver ce col et réussir à passer.

Bivouac sur les hauteurs


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En complément
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