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Traversée de la baie Sloggett |
Ce matin, mon sac est chargé sur le
cheval de bât et je pars avec Luis dès 7 heures afin de ne pas être bloqué par
la marée montante. Une bonne partie du parcours pour rejoindre la baie Sloggett
passe en effet par des falaises recouvertes à marée haute et il ne faut pas
traîner.
A pied, Geronimo et Ramón n’ont de
leur côté, pas d’autres choix que d’attendre l’inversion de marée pour se
mettre en route. Après plusieurs jours, nos chemins se séparent donc sur un
dernier maté au rancho Ibarra.
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En rejoignant la côte |
Certains passages de falaises et
de tourbières sont délicats pour les chevaux auprès desquels nous devons
marcher la plupart du temps. Nous progressons néanmoins à un rythme soutenu
d’autant que nous utilisons les neuf années d’expérience de Luis sur ce
terrain. Je découvre ainsi quelques « raccourcis » dont j’ignorais
totalement l’existence et je souris en repensant aux galères des précédentes
expéditions, alors que d’invisibles traces ne se trouvaient parfois qu’à
quelques mètres.
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Pas d'échappatoire à marée haute... |
La baie Sloggett où nous
parvenons, marque l’entrée de la Péninsule Mitre et le rio Lopez qui s’y écoule,
en est la porte. Une porte capricieuse, dont le lit change constamment et est vraiment
dangereux.
Située à la sortie du canal de
Beagle et son abri relatif aux dépressions, cette baie offre un changement
d’environnement saisissant. On y accède par un plateau de tourbière dont les
couleurs hypnotisent celui qui s’y aventure et permettent de ne pas se
laisser effrayer par l’autre rive du rio Lopez. Malgré plusieurs voyages, la
péninsule Mitre reste toujours aussi intimidante et me toise durant les
quelques heures que demande la traversée de la baie.
Sur le plateau, les convois de bovins escortés régulièrement par Luis ont laissé des traces bien visibles sur certains
tronçons de tourbière. La mousse piétinée se régénérant très lentement, suivre
ces traces rassure et évite de se perdre mais est également synonyme de
pataugeoire…. Et les chevaux n’ont pas nos poids. Soudain mon cheval s’effondre
dans un long bruit d’aspiration. L’une de ses pattes est profondément enfoncée dans
la tourbe et il parvient avec beaucoup de difficulté à se relever, sortir de ce
trou et reprendre sa route aidé de quelques paroles douces.
Ne pas trop suivre les traces, ne pas trop sans éloigner : l'équilibre est fragile.
Ne pas trop suivre les traces, ne pas trop sans éloigner : l'équilibre est fragile.
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Baie Sloggett |
Par cette voie, nous atteignons la plage à proximité du voilier polaire Nashachata (*).
L’hiver dernier a fini de drosser l'épave contre la falaise. Même de quelques yards, les
énormes houles du grand Sud ne pourront plus le faire voyager. Son périple s'est définitivement achevé mais tout son matériel récupérable lui survit encore dans les deux ranchos de la
baie. Chez Ramón comme chez Luis (rancho
Julian), rien ne se perd.
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rancho Julian |
Nous atteignons rancho Julian en fin de mâtinée et le premier réflexe est, comme toujours, d’allumer le feu pour mettre l’eau à chauffer. Les chiens, de leurs côtés, s’affairent à retrouver (et défendre) l’os qu’ils rongeaient déjà lors de leur dernier passage.
Quelques matés puis nous préparons
une solide ration de pâtes, qu’une petite sieste aidera à digérer.
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Solo |
Si la météo m’y autorise, mon
objectif est de tenter la traversée des monts Lucio Lopez. Luis m’a confirmé
qu’il y avait un passage et que la vallée au nord de ces montagnes permettait
de rejoindre la baie Aguirre. Au-delà de l’exploration, cela m’éviterait aussi
de suivre le littoral très exposé et qui m’avait laissé un détestable souvenir
lors de ma précédente tentative.
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Un derrière regard à la baie Sloggett.... |
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.... avant d'entrer dans le royaume du condor. |
Tant que le ciel est bleu, je ne traîne pas et me lance donc dans l’ascension avec l’espoir de trouver un col. Malheureusement seuls des précipices m’attendent sur le versant Nord des premières crêtes et il faut se résoudre à faire demi-tour avant que le soleil ne se couche.
J’enrage à l’idée de ne peut être
plus pouvoir accéder aux cîmes le lendemain et devoir à nouveau longer le
littoral. Je parie néanmoins sur une nuit calme et bivouaque donc dans une vallée d’altitude, afin de rejoindre les cîmes au plus tôt le lendemain.
Le passage du soleil derrière la
montagne amène une ombre fraîche qui semble réveiller le vent, bien discret
tout l’après midi. Malgré cette brutale chute des températures, le ciel reste
du bleu le plus optimiste et de mon perchoir, je profite d’une magnifique
soirée à l’embouchure du canal de Beagle.
J’ai confiance pour le lendemain. Je vais trouver ce col et réussir à passer.
J’ai confiance pour le lendemain. Je vais trouver ce col et réussir à passer.
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Bivouac sur les hauteurs |
En complément
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(*) Naufrage du Nashachata :
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